Tout chez Maren Ruben se produit à la surface qui met en contact l’intérieur et l’extérieur. La peau dispose d’une énergie vitale proprement superficielle. Gilbert Simondon dit : « Le vivant vit à la limite de lui-même, sur sa limite.», il entend aussi qu’un individu est un devenir plutôt qu’un état, une relation plutôt qu’un terme, qu’il convient de parler d’individuation plutôt que d’individu. L’individuation de l’individu, ne donne pas seulement naissance à un individu, mais aussi à son milieu associé. 
La polarité caractéristique de la vie se situe au niveau de la membrane ; c’est à cet endroit que la vie se manifeste de façon perceptible. Une topologie dynamique qui entretient elle-même la métastabilité par laquelle elle existe. Élévation et profondeur n’ont de valeur biologique que par cette surface topologique de contact. 
Il n’y a pas de distance en topologie ; toute la masse de la matière vivante qui est intérieure est activement présente au monde extérieur à la limite du vivant. Être du côté de l’intériorité ne signifie pas simplement être dedans, mais être du côté intérieur de la limite. Au niveau de la membrane polarisée s’affrontent le passé intérieur et l’avenir extérieur… Maren Ruben dessine des biogéographies, le dessin devient geste et le temps présent se donne par d’innombrables signes s’accumulant les uns aux autres. Les matériaux varient : simple papier, papier transparent, papier de riz, gaze de coton, tulle, pour n’en nommer que quelques uns. Parallèlement à la peau, ils sont porteurs de l’expression, de la manipulation et d’une écriture se répétant et se nuançant perpétuellement. Ils deviennent des organismes vivants aux fines membranes, souples, perméables, silencieuses. 


Texte pour l’exposition « Parallele » au CEAAC 2018

Jean Claude Luttmann
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